Entretien avec Arundathi Roy

Une chouette sur un arbre, témoin ou ange gardien, regarde par la fenêtre. Dans l’appartement dorment un bébé et une femme nue ; sur une table, un gâteau d’anniversaire avec une petite bougie. L’image est poétique, précise, énigmatique. Mais le récit repart déjà ailleurs, le lecteur ne comprendra que plus tard que cette scène rassemble les éléments d’un roman où il est question de mères et d’enfants, d’abandons et de guérillas.


Arundathi Roy, Le Ministère du Bonheur Suprême. Trad. de l’anglais (Inde) par Irène Margit. Gallimard, 538 p., 24 €


Dans cette histoire, on rencontre une hijra (une femme transgenre) musulmane de Old Delhi, un militant indépendantiste du Cachemire, une paysanne de la rébellion naxalite, un médecin gréviste de la faim, un officier des services secrets, un journaliste admiré de tous (lui seul sait que sa réputation est usurpée) et quelques autres.

Il y a vingt ans, en 1997, Arundathi Roy avait publié le très inspiré Dieu des Petits Riens qui se passait dans un village du Kerala et lui avait valu le Booker Prize et une célébrité mondiale. Depuis, elle n’avait écrit que des essais, tous liés à ses engagements militants : sur l’environnement, les Naxalites (militants de la guérilla maoïste en Inde), le nationalisme hindou, les massacres du Gujarat… autant d’épisodes de l’histoire indienne récente qu’on retrouve dans le roman. Une première partie tourne autour d’Anjum, la hijra d’Old Delhi. La deuxième autour de Tilo, une jeune architecte originaire du Kerala. Les deux femmes seront réunies dans une troisième partie, autour d’un bébé et dans un cimetière. Dans la vie d’Anjum, il y a Saddam Hussein, un vigile qui, malgré ce que laisse penser son nom, est né dalit (hors caste) et hindou. Saeeda, une hijra de la nouvelle génération qui sait comment s’adresser aux ONG et aux journalistes étrangers : elle manie avec une grande aisance des termes comme cis-homme, FversH ou HversF.

Cette première partie n’est pas la plus intéressante. Le roman prend vraiment son envol quand le récit nous entraîne au Cachemire avec Tilo et trois hommes qu’elle a connus quand tous étaient étudiants. L’un est Cachemiri et se bat contre l’occupation indienne. Cette deuxième partie est très belle, très forte, tragique, c’est là que se cristallisent des histoires d’amitiés et d’amours impossibles, de fidélités et de trahisons. Dans le conflit du Cachemire qui dure depuis des décennies, il y a des victimes innocentes, des enfants tués, des attentats et des interrogatoires. Qui est combattant terroriste et qui résistant courageux ? Dans une sale guerre, personne ne garde les mains propres, pas même ceux qui sont du bon côté. À chaque page, on ressent la terreur, le désespoir et la perversité de la situation, parfois aussi de la tendresse et de la générosité. Cette vallée entre lacs d’un bleu profond et sommets éblouissants de l’Himalaya est un des plus beaux endroits du monde mais, à cause de la situation, ses habitants ne sont plus que djihadistes, martyrs, informateurs ou victimes. Arundathi Roy décrit magnifiquement l’ambivalence des sentiments et l’ambiguïté des situations. Elle nous ouvre le dictionnaire cachemiri-anglais où Tilo note la novlangue de la guerre. À la lettre E, par exemple, on peut lire : « Embuscade / explosion /Ex-gratia (compensation financière pour le décès d’un proche / EJK (élimination extra-judiciaire / Erreur de tir (mort accidentelle) / ESPT (état de stress post-traumatique… » On pourrait dire que presque tous les personnages de ce roman sont en état de stress post-traumatique, tous ont perdu quelque chose ou quelqu’un. Mais il y en a un qui ressemble particulièrement à l’auteur. Le portrait de la mère de Tilo – une femme du Kerala, cultivée, courageuse, chrétienne, fondatrice admirée d’une école de jeunes filles et mère assez incompétente – pourrait être celui de la mère d’Arundathi Roy.

Dans Le Ministère du Bonheur Suprême, il y a aussi une critique à la fois drôle et radicale de l’Inde nouvelle. D’un côté, devant l’hôpital d’oncologie pédiatrique, des parents « jouent à la roulette indienne » en achetant des médicaments pour leurs enfants, « il y avait six chances sur dix que les médicaments qu’ils achètent soient des faux ». De l’autre, on voit les chaînes d’info continue avec leurs jeunes reporters qui « se répandent comme une épidémie. Ils étaient novices mais présentaient bien et posaient des questions aussi creuses qu’insistantes. Aux pauvres, ils demandaient ce que ça faisait d’être pauvres et aux affamés, comment c’était d’avoir faim ».

Ce roman fait de matériaux hétérogènes est assez déstructuré, ce qui était le projet de l’autrice. On a le sentiment que cette déstructuration n’est pas toujours sous contrôle, que les deux premières parties ne fonctionnent pas vraiment ensemble… même si elles finissent par se rencontrer, comme se rencontrent Anjum, Tilo et tous les autres parias de l’histoire, autour d’un bébé abandonné puis adopté. En fait, la dernière partie a quelque chose d’optimiste, de presque joyeux. Elle se passe dans une espèce de mini-ZAD installée dans un cimetière musulman au cœur de Old Delhi. Autour d’Anjum, ce lieu devient petit à petit un sanctuaire, un refuge où exclus et marginaux de toutes les religions, de tous les sexes et de toutes les castes forment une nouvelle famille. Il laisse espérer une consolation aux affligés. Et leur dit que le monde peut finalement être un endroit vivable.

Arundathi Roy, lors de son passage à Paris en janvier dernier, a bien voulu répondre à nos questions.

Arundathi Roy, Le Ministère du Bonheur Suprême

Arundathi Roy © Mayank Austen Soofi

Quel est le sujet de votre roman ?

Les romans ne devraient pas avoir de sujet, ce serait réducteur. Si je devais répondre à votre question, je dirais : c’est un roman sur l’air qu’on respire dans cette partie du monde, un air qui est plein de poésie, de musique, d’humour, de violence…

Et si, j’insiste, parce que beaucoup de romans sont sur la poésie, la musique et l’air qu’on respire…

Eh bien… je ne serais pas contente si j’avais écrit un roman dont je pourrais dire en une phrase de quoi il parle. Je ne serais pas contente et je ne l’aurais peut-être pas publié.

Votre premier roman se déroulait au Kerala, que vous connaissez très bien puisque vous y avez passé votre enfance. Celui qui vient de sortir parle du Cachemire, des Naxalites, des massacres du Gujarat. Vous avez fait des recherches sur ces sujets ?

C’est le monde dans lequel j’ai vécu ces vingt dernières années, plus longtemps que j’ai jamais vécu au Kerala. Il y a une citation de James Baldwin qui est très importante pour ce livre : « Ils ne me croyaient pas justement parce qu’ils savaient que ce que je disais était vrai ». Tout dans ce roman est tissé autour d’une connaissance très intime de ce qui se passe dans ces endroits.

Vous connaissez le Cachemire depuis longtemps. Comment avez-vous vu la situation évoluer ?

J’y vais régulièrement depuis des dizaines d’années, en fait mes amis les plus proches sont des Cachemiris. Au début, on voyait des soldats partout, tout le temps… Même les embouteillages étaient réglés à coup de AK 47. Maintenant, les militaires sont moins visibles, le maintien de l’ordre a pris d’autres formes, ils utilisent beaucoup le renseignement, les téléphones portables sont surveillés. Mais c’est organisé de telle façon que l’armée peut se déployer en quinze minutes dans toute la vallée. Les forces de sécurité sont partout.

À un moment dans le livre, des jeunes filles branchées de Delhi disent quelque chose comme : « Wouaou, trop fun, le Cachemire. Maintenant, tout est normal, on peut même y faire du tourisme ». C’est vrai ?

En fait, comme ce conflit dure depuis très longtemps, il y a différentes phases. Et le tourisme fait partie du plan d’occupation. Vous avez des centaines de milliers de touristes et des dizaines de milliers de pèlerins hindous qui vont au sanctuaire d’Amarnath. Et tout d’un coup, il se passe quelque chose, tout le monde a peur, tout le monde disparaît, la violence repart pour des mois ou des années. Et puis la vie reprend. Donc oui, absolument, c’est comme ça. Voilà pourquoi un personnage dit : « La normalité est déclarée », comme par décret.

Et les hijras ? Vous les avez souvent rencontrées ?

J’ai un petit appartement dans Old Delhi, près d’une de leurs maisons, je les connais bien. Sinon, je n’aurais pas pu écrire sur elles, mais je n’ai pas fait d’enquête. Je n’ai pas décidé d’écrire sur les hijras, elles font partie de ma vie, comme les autres, les officiers des services secrets, les aborigènes ou les guérilleros naxalites. J’ai passé des semaines et des semaines avec les guérilleros dans une forêt de l’État de Chhattisgarh. C’est le sujet de mon texte Walking with the Comrades [publié en 2010 dans Outlook. En français sur le site du Secours rouge belge sous le titre : Ma marche avec les camarades].

Quand vous avez commencé à travailler sur ce livre, les premières pages que vous avez écrites étaient sur ce bébé abandonné trouvé sur un trottoir de Delhi. Vous commencez habituellement avec des images ?

Pour Le Dieu des Petits Riens, la première chose que j’ai écrite était une image : des enfants dans une voiture, coincés au milieu d’une manifestation communiste. Avec ce nouveau roman, tout au début, j’avais des phrases bizarres qui flottaient dans ma tête comme des nuages… Mais pour en revenir à l’histoire de ce bébé – une petite fille –, c’est un moment que j’ai vécu et qui m’a troublée pendant longtemps. Ça se passait à Jantar Mantar, près de Connaught Place, dans le centre de Delhi. C’était un endroit où tout le monde pouvait venir parler, écouter, manifester. On y croisait des représentants de tous les mouvements sociaux et politiques, des militants anti-barrage, des grévistes de la faim. Malheureusement, cet endroit n’existe plus, le gouvernement l’a fait évacuer il y a deux mois. Bref, la nuit était déjà très avancée et, tout à coup, ce bébé est apparu. Un moment incroyable. C’était comme une nativité inversée, avec cette petite fille noire, dans un berceau de détritus, tout sauf le fils de Dieu.

Vous dites avoir été « troublée » ?

Pas exactement troublée, mais c’est une de ces choses auxquelles votre esprit s’accroche et autour desquelles il se met à tourner. C’était plus qu’une image, j’y pensais tout le temps. Il y avait là tous ces importants représentants des mouvements sociaux, tous ces opposants politiques, face à ce bébé abandonné, personne ne savait quoi décider… et finalement la police a été appelée. Ça m’a beaucoup troublée que personne n’ait rien trouvé d’autre à faire que d’appeler la police. Moi comme les autres. Il faut dire que beaucoup de ces mouvements politiquement radicaux sont socialement extrêmement conservateurs, c’est compliqué… C’est ce qui fait qu’on se tourne vers la littérature.

Dans ce roman, il y a plusieurs bébés abandonnés, adoptés, tués. Et les femmes ont un rapport compliqué à ces bébés.

… à la maternité et aux enfants, oui, c’est tout à fait vrai. Tilottama est biologiquement une femme, elle peut avoir des enfants, mais ne veut pas être mère. Anjum ne peut pas avoir d’enfants, elle adopte un bébé. Toutes les deux ont une manière d’aimer en quelque sorte militante. En fait, ce roman dit qu’il n’y a pas une seule sorte d’amour – celui des liens du sang et des liens familiaux – mais que les gens trouvent toutes sortes de manières non orthodoxes, inhabituelles, de s’aimer et de veiller les uns sur les autres.

La relation entre Tilottama et sa propre mère est compliquée. Est-ce la raison pour laquelle elle ne veut pas d’enfants ?

Une relation certainement compliquée, oui. Mais je ne pense pas qu’il n’y ait qu’une seule raison. Quand on lui demande si elle et Musa vont se marier, elle répond qu’elle ne veut se marier avec personne parce qu’elle veut être libre de mourir. Elle est un peu spéciale, étrange, dans sa manière de toujours tout défier calmement. Mais, bien sûr, sa relation avec sa mère est telle qu’elle ne se fait pas confiance, elle a peur d’être encore pire qu’elle.

À un moment, une hijra dit à Anjum : « La guerre est en nous, le conflit indo-pakistanais est en nous ». C’est vrai pour les autres personnages de ce roman ?

Oui, je pense que tous ont en eux une frontière prête à s’enflammer. Chez Anjum, c’est la frontière du genre ; chez Saddam Hussein, celle de la conversion religieuse, ce qui est encore plus dangereux en Inde aujourd’hui ; chez Tilottama, c’est la caste ; chez Garson Hobart, autre chose encore. D’un côté, il a une manière très raisonnable, détachée, cruelle, de voir les événements du Cachemire et de n’être touché par rien. De l’autre, c’est un homme alcoolique et torturé. Dans un pays qui fonctionne selon un quadrillage très serré, tous ces personnages sont, d’une certaine manière, hors grille.

Vous écrivez des pages très drôles sur ce pays qui a beaucoup changé en vingt ans. Même les plus pauvres, comme les vendeurs de rue, qui proposaient aux feux rouges des stylos ou des bâtonnets d’encens vendent aujourd’hui des chargeurs de téléphone ou des livres de développement personnel…

… ou des éditions pirates du Ministère du Bonheur Suprême

Même pour eux, le contexte économique a changé, mais vous semblez très critique sur l’évolution de l’Inde. Vous diriez que c’est mieux économiquement mais pire politiquement ?

C’est pire sur les deux plans. Si vous regardez ce qui se passe maintenant, avec la démonétisation de 2016, les nouveaux impôts… les gens sont au bord du gouffre. La croissance économique, le nombre de millionnaires et de milliardaires, c’est une chose. Mais dans les régions rurales, il y a un incroyable désespoir. Et ces gens, aux feux rouges, qui vendent des drapeaux « My India is great », et cet homme qui est guide et qui fait visiter le barrage qui a déplacé son village et ruiné sa famille… Les humiliations sont terribles. 200 000 fermiers se sont suicidés, nous avons le nombre le plus élevé au monde d’enfants souffrant de malnutrition. Nous avons le record de fœticides femelles. Mais nous avons aussi les femmes les plus libres et les plus combattives du monde !

Pendant vingt ans, vous avez été une activiste…

… j’ai du mal à me reconnaître dans ce mot… Autrefois, quand un écrivain écrivait sur la société dans laquelle il vivait, c’était toujours un écrivain. Aujourd’hui, dans ce nouveau monde, on attend des écrivains qu’ils soient des entertainers, qu’ils soient sur les listes de bestsellers et dans les festivals littéraires. Si on s’éloigne de ça, est-ce qu’on doit avoir une fiche de poste différente ?

Il y a une expression en France : « écrivain engagé ». Vous pourriez vous y reconnaître ?

Honnêtement, je préférerais m’en tenir à « écrivain ». Je pense que ce mot inclut tout ce que je fais. Je n’ai ni diplôme, ni fiche de poste particulière. Sinon, ça laisserait penser que l’écriture est une chose et que l’écriture engagée en est une autre. Pour moi, tout ça fait partie de ce que je fais. Il s’agit toujours de chercher à comprendre.

Néanmoins, seriez-vous d’accord pour dire que, dans ce deuxième roman, la société et la politique sont plus présentes que dans le premier ?

À la parution de mon premier roman, les gens ont essayé de ne pas voir le fait que Ammu et Velutha (qui est un dalit) faisant l’amour, c’était incroyablement politique. À la sortie du livre, j’ai été accusée de corruption de moralité publique. Les communistes étaient furieux [le PC est au pouvoir au Kerala depuis 1957]. Et puis, quand j’ai eu le Booker Prize, les gens ont voulu me respectabiliser, parce que c’était l’essor de la New India, et de la nouvelle star internationale… Et comment respectabilise-t-on la lauréate du Booker Prize ? On dit : le sujet de ce livre, c’est les enfants. Mais c’était un livre extrêmement politique.

Pour ce nouveau roman, je ne voulais pas écrire Le Dieu des Petits Riens 2. Je voulais me demander : que peut-on faire avec un roman aujourd’hui ? Comment regarder les choses comme seul un roman peut le faire ? Je voulais repousser les limites, voir ce qu’on pouvait faire avec la forme, expérimenter. Le Dieu des Petits Riens se déroulait dans un village. Quand j’écrivais, je passais des heures à décrire la rivière, les poissons. Cette fois-ci, je voulais faire un livre sur une ville, ou plutôt comme une ville, qui est planifiée, déplanifiée, replanifiée et qui sort en tourbillonnant des murs de la vieille ville vers la capitale de la nouvelle superpuissance, vers son importance et sa violence… La violence d’essayer de convertir une société très complexe en un simple nationalisme culturel. La violence d’une colonie qui, du jour au lendemain, est devenue colonisateur.

Cette manière de voir le roman comme une ville est-elle liée à votre formation d’architecte ?

C’est possible, j’ai toujours été fascinée par la manière dont évoluent les villes. Même si j’ai commencé par l’architecture, au moment de mon mémoire de fin d’études, j’étais bien plus intéressée par l’urbanisme. Comment les villes deviennent ce qu’elles sont. Le contrôle et le non-contrôle d’une ville. Pour moi, le roman, c’était ça : construire du chaos quasi mathématiquement.

Vous n’avez pas écrit de fiction pendant vingt ans. Récemment, vous avez dit que le roman était ce qui vous donnait le plus de plaisir. Quel genre de plaisir y a-t-il dans la fiction, qu’il n’y a pas dans la non-fiction ?

Pour moi, la non-fiction est toujours une intervention dans une situation bloquée, c’est une argumentation. Alors que la fiction est la construction d’un univers. C’est un acte d’amour, pas un acte de guerre. Ce que j’aime là-dedans, c’est la possibilité du jeu, de la fantaisie. Récemment, j’étais en train d’enregistrer l’audio-livre du Ministère… à Delhi. De temps en temps, je regardais les ingénieurs du son et ils avaient l’air de se dire : « Mais qu’est-ce que c’est que ça ? Cette femme est cinglée ! » Dans la fiction, je sens que chaque partie de moi-même est engagée, il y a de l’espièglerie, de l’amusement, la possibilité d’être plusieurs personnes à la fois. Et aussi, pendant toutes ces années avec Anjum, Tilo et Saddam, nous avons vécu et voyagé ensemble. C’était très beau.

Vous avez dit qu’en cette époque de fake news, la vérité était dans la fiction.

Mais oui. Les gens me demandent tout le temps : c’est vrai ou c’est de la fiction ? Et je réponds : pourquoi voulez-vous les opposer ? La fiction, c’est comme la musique : quand c’est vrai, quand c’est juste, on le sent. Si vous regardez le Cachemire, vous ne pouvez pas raconter ce qui s’y passe seulement avec des reportages parce qu’il y a tant de choses pour lesquelles vous ne pouvez montrer de preuves. Dans le roman, à un moment, Amrik Singh, ce militaire sadique, pose son flingue sur la table où il a fait servir du thé et des biscuits… la terreur de ce geste… ça fait comprendre ce qui ce passe là-bas.

Et maintenant, vous avez envie d’écrire de la fiction ?

Pour le moment, je n’ai pas d’idée de ce que sera demain. Ce n’est pas comme si je pouvais m’asseoir et écrire. J’ai pu commencer à écrire Le Ministère du Bonheur Suprême quand Anjum a commencé à me rendre visite. Je dois attendre qu’on me rende visite.

Propos recueillis par Natalie Levisalles

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