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Journal de la littérature, des idées et des arts 27/12 – 09/01 2024

En attendant Nadeau

Sándor Márai Journal. Les années d’exil (1968-1989)
Statue de Sándor Márai © CC-BY-SA-3.0/Jan Starec/WikiCommons

Sándor Márai, la vie qui résiste

Lire le dernier tome du Journal de Sándor Márai revient à compagnonner avec l’un des grands écrivains hongrois du siècle dernier. On y découvre ses années d’exil entre Salerne et San Diego, sa vision du monde, ses idées, son travail et ses lectures fondamentales. On éprouve avec lui ses deuils, ses doutes, sa croyance en la force de la littérature et son enthousiasme pour la vie.

Éditorial

Écrire, lire, chercher à comprendre, s’essayer à réagir aux événement, se connaître, se situer, revient à faire face à une urgence vitale. Les deux mercredis d’EaN s’ouvriront donc sur les Journaux de deux grands écrivains hongrois qui semblent y répondre : Sándor Márai et Imre Kertész. Tous deux expriment l’angoisse d’être, le déchirement du déracinement, les rapports entre l’Est et l’Ouest, la nécessité des lectures fondatrices, la manière d’affronter la disparition, de conserver des traces et d’organiser ce que l’on pense de soi-même. Deux lectures qui surtout rappellent l’extrême pouvoir de la vie et un certain devoir du bonheur.

Sommaire

Géraud-Christophe Michel Duroc, duc de Frioul
Correspondance du grand maréchal du palais de Napoléon Ier
par Maïté Bouyssy
Michel Orcel
Leopardi. Poésie, pensée, psyché
par Yves Lepesqueur
"Hiérarchie", de Emanuele Coccia (détail) © Rivages
Fond d’ange, « Diptyque de Melun », Jean Fouquet (1452) © CC0/WikiCommons

Hiérarchie céleste, hiérarchie terrestre

C’est à propos des anges que le mot « hiérarchie » a été inventé. C’est donc à partir d’eux que le philosophe Emanuele Coccia entreprend de penser les liens entre théologie et politique. Avec l’affirmation qu’elle porte au sujet des anges, l’Église professe une véritable théorie politique.
Exposition 2023 Julia Margaret Cameron Jeu de paume
« Call, I Follow, I Follow, Let Me Die ! » [Appelle et je viens, je viens ! Laissez-moi mourir], Julia Margaret Cameron (1867). Tirage au charbon (Détail) © Collection de la Royal Photographic Society au V&A, acquise avec l’aide généreuse du National Lottery Heritage Fund et de l’Art Fund

Capturer la beauté

Entrer dans l’exposition que consacre actuellement le Jeu de Paume à la photographe britannique Julia Margaret Cameron (1815-1879), c’est entrer dans un autre espace temporel. La scénographie minimaliste parvient à développer, sans prétention aucune et avec une grande précision, cette « captation de la beauté ».
Stéphanie Solinas, L’Être plus. Itinéraire pour Devenir soi-même
Californie © Jean-Luc Bertini

Augmenter la réalité

L’artiste plasticienne Stéphanie Solinas n’est pas la première à voyager dans le grand Ouest américain. Mais elle ne se contente pas d’un récit fasciné devant l’aventure, la contre-culture ou l’innovation technologique. Dans son livre L’Être plus, elle en fait l’espace d’une réalité augmentée.
Violette Leduc ravages
Sappho © CC BY 2.0/Mark Morgan /Victoria and Albert Museum

Pour une histoire de la littérature lesbienne

La nouvelle édition de Ravages de Violette Leduc réintègre les passages qui manquaient à l’édition de 1955. Enfin complet, le roman gagne une dimension supplémentaire et ouvre la possibilité de faire enfin une histoire de la littérature lesbienne en France.

Une Histoire globale des révolutions, sous la direction de Ludivine Bantigny, Quentin Deluermoz, Boris Gobille, Laurent Jeanpierre, Eugénia Palieraki, Paris, La Découverte
Affiche « Freedom » © CC-BY-2.0/Miram Eldisawy/WikiCommons

Les révolutions dans l’Histoire   

C’est sans doute une fois refroidie, quasi décomposée, que l’idée de révolution a pu accomplir son ultime transformation : faire son entrée comme objet d’histoire. Paru cet automne, Une histoire globale des révolutions replace au centre la question révolutionnaire, à l’échelle internationale. Un volume collectif d’une grande richesse, organisé selon une logique de constellation et de traversée.
Salah Hamouri, Prisonnier de Jérusalem. Un détenu politique en Palestine occupée
Prison de Damon, située dans le village palestinien dépeuplé de Khirbat Al-Dumun (Israël) © CC BY-SA 3.0/Hanay /WikiCommons

Dans les prisons israéliennes

Dans son témoignage Prisonnier de Jérusalem, l’avocat franco-palestinien Salah Hammouri raconte son expérience de détenu politique pendant dix ans. Son récit éclaire le rôle central du système carcéral dans la politique israélienne d’occupation.
Paul Louis Rossi
Paul Louis Rossi sur la plage de Dieppe (2022) © Marie Étienne

Paul Louis Rossi et le murmure du monde

Paul Louis Rossi est un artiste qui goûte le divers. À la fois poète, critique, peintre, il combine les gestes artistiques, les confronte les uns aux autres. Nous lui consacrons une livraison exceptionnelle de notre chronique « À l’écoute » qui rassemble des souvenirs et des lectures d’Yves di Manno, Anne Malaprade, Christian Rosset et Marie Joqueviel-Bourjea.

Lori Saint Martin, Pour qui je me prends
« Say it » ( Berlin, 2017) © CC BY 2.0/Ittmust/Flickr

Bifurcation francophone

Pour qui je me prends envisage l’abandon d’une langue pour une autre comme un geste profondément existentiel. L’écrivaine et traductrice québécoise Lori Saint-Martin raconte ainsi sa vie, son rapports aux origines, à partir de ce basculement linguistique fondateur. Une autobiographie atypique qui enthousiasme par sa liberté de ton et son originalité.

Caroline Deyns Murmur
« Murmure » © CC BY-SA 2.0/Daniel Mott/Flickr

Voix prisonnières

MURmur est un livre de voix. Caroline Deyns y déploie un long monologue innervé, étouffé par la rage, qui glisse vers des voix multiples. En adjoignant à un récit intime celui du procès de Bobigny en 1972 et la figure de Gisèle Halimi, elle entremêle sujet et collectif, idée et émotion. Elle trouve une forme littéraire pour dire les violences faites aux femmes et leur immense colère.

 

Oublier Camus Olivier Gloag
Albert Camus © CC BY 2.0/SPDP/Flickr

La question Camus

La virulence des critiques adressées à Oublier Camus d’Olivier Gloag interpelle : qu’y a-t-il dans ce livre qui dérange tant, en particulier à droite ? Pour le comprendre, En attendant Nadeau sollicite le point de vue d’Yves Ansel, qui a travaillé sur la postérité de Camus. S’il a tendance à noircir le tableau, le pamphlet d’Olivier Gloag a le mérite de montrer que Camus fut un écrivain colonial. Il faut y revenir pour comprendre la France contemporaine.

Raoul Walsh, le patron

Raoul Walsh en jeux explore les nombreuses facettes d’un cinéaste à l’œuvre saisissante et quelque peu oubliée. Dix-sept auteurs reviennent sur la filmographie et le parcours d’un metteur en scène qui aura réussi son passage du temps du muet à l’âge d’or hollywoodien.

 

Les mystères Leopardi

Michel Orcel est l’un des plus fins connaisseurs de l’œuvre de Leopardi. Son nouveau livre l’aborde avec une grande liberté, comme affranchi de la réputation du « grand poète romantique italien ». Une lecture savante qui aide à éclairer un poète à la réputation ardue.

Les choses napoléoniennes

Fruit d’un travail de recherche remarquable, la publication de la correspondance de Duroc, grand maréchal du palais de Napoléon Ier, pourrait ne s’adresser qu’aux adulateurs des choses napoléoniennes. La lecture de ce volume nous détrompera vite, révélant un personnage fascinant au cœur du pouvoir.

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Les derniers articles de notre numéro 187

Richard Yates | Jeunes cœurs éprouvés.
Richard Yates © Jerry Bauer / Opale Leemage

Homo americanus

Richard Yates est sans doute l’un des plus grands écrivains états-uniens de la seconde moitié du vingtième siècle. La parution de Jeunes cœurs éprouvés, seul de ses romans à n’avoir pas été encore traduit en français, donne l’occasion de revenir sur une œuvre majeure qui réfléchit la place de la fiction dans nos vies et nous oblige à affronter une solitude absolue.

Eau noire Michalis Makropoulos Christos Armando Gezos La boue
Butrint © Jean-Luc Bertini

Grèce : écrire après la crise

Publiés à quatre ans d’intervalle, au milieu et à la fin de la décennie d’austérité, deux romans grecs dépeignent une situation de désastre et d’asphyxie. Leurs personnages – métaphores d’une génération perdue, en sursis dans son propre pays – résistent à l’ordre des choses. Le premier est une fable sur la destruction du lien social, l’autre impose une langue du désespoir.

Philipp Guston que peindre sinon l'énigme
Guston préparant le WPA Federal Art Project (1939) © CC0/WikiCommons/ Archives of American Art

La troisième main de Philip Guston

Bien que Philip Guston soit un des plus grands artistes de notre temps, il est encore peu connu en France. La parution de ses Écrits, conférences et entretiens permet de découvrir sa personnalité, ses obsessions, son affinité avec le monde des écrivains et des musiciens. Une manière passionnante d’aborder de l’intérieur une œuvre hors du commun, de la situer dans son époque et d’en appréhender la puissance politique.

Un monde de ciel et de terre Aleksandar Hemon
Aleksandar Hemon (2023) © Jean-Luc Bertini

« Une épopée de réfugiés » : entretien avec Aleksandar Hemon

Un monde de ciel et de terre d’Aleksandar Hemon est une vaste fresque qui commence en 1914 à Sarajevo, sa ville natale, pour s’achever à Shanghai en 1949. C’est à la fois un roman historique, une grande histoire d’amour entre deux Bosniens et une œuvre politique puissante. L’écrivain confie à EaN la gestation de ce livre, sa composition complexe et rappelle que « toute fiction consiste à se représenter le vécu des autres ».

"La bête 2", Zidrou et Frank Pé
« La bête 2 », Zidrou et Frank Pé (Détail) © Dupuis

La bête et les vestiges de l’enfance

Le second volet du chef-d’œuvre du scénariste  Zidrou et du dessinateur Frank Pé, hommage au mélancolique André Franquin, évoque la Belgique neigeuse de 1955, hantée par les fantômes de l’Occupation. Tour de force en deux albums, La Bête s’impose déjà comme un classique de la bande dessinée contemporaine.

Le retour de Lagaffe Delaf
Gaston Lagaffe, Delaf (2023) © Dupuis

Lagaffe remet le couvert

La parution du premier album de Gaston Lagaffe signé par un autre dessinateur que Franquin a occasionné une vive polémique. Le travail colossal de Delaf interdit de faire porter le débat sur le plan technique de la réalisation de l’album mais plutôt sur les choix d’écriture ou de composition du personnage qui brisent la proximité que le lecteur a pu ressentir avec Gaston et ses amis.

Une mythologie du vécu

Librement inspiré du Tour de France par deux enfants et du Dépaysement de Jean Christophe Bailly, Le voyage intérieur de Gérard Cartier compose un itinéraire géographique fascinant. Une poésie documentaire qui questionne en profondeur notre mémoire, notre rapport au temps et aux lieux.

Une révolution pour la conservation de la nature

Le politologue Bram Büscher et l’anthropologue Robert Fletcher cherchent à transformer d’un même élan la conservation de la nature et le monde dans lequel elle est mise en œuvre. Ils recourent pour cela à la « conservation conviviale », qui repose sur une politique de l’équité, du changement structurel et de la justice environnementale.

Profusion de mousses

Les Mousses d’un vieux presbytère, recueil de contes et récits de Nathaniel Hawthorne, paraît dans une nouvelle traduction. Ce volume que l’écrivain laissa paraître bien qu’il en fut peu satisfait rassemble des textes très inégaux. À leur lecture, on peut (on doit ?) se demander sérieusement si les traductions intégrales sont toujours justifiées.

Consultez le second volet du numéro :