Thierry Girard est photographe depuis le milieu des années 1970. En 1993, il présente au musée Arthur Rimbaud l’exposition Mémoire blanche, dont sera tiré un livre du même nom. Les photographies exposées ont depuis été acquises par le musée et sont présentées à tour de rôle dans l’exposition permanente consacrée à Arthur Rimbaud.
Une errance à travers Charleville et Mézières, entre un buste en bronze square de la gare, et une tombe blanche à l’autre bout de la ville. Juin 1992.
À l’intérieur de la bibliothèque municipale.
Grotte mariale (Vierge disparue), près du bois d’Amour à Mézières.
Dans les réserves du musée de l’Ardenne.
Dans la vitrine d’un brocanteur à Charleville.
Intérieur de l’appartement où vécut Rimbaud avec sa mère et sa sœur le long de la Meuse à Charleville. Après le décès de la dernière occupante, Raymonde Rigaux, la maison a été rachetée par la ville et est devenue la Maison des Ailleurs.
Carte tapissant le fond d’une armoire à l’intérieur de l’appartement où vécut Rimbaud avec sa mère et sa sœur le long de la Meuse à Charleville.
Quelques échappées autour de Roche Avril – octobre 1992. Le mur aveugle. Tout ce qu’il reste de l’ancienne ferme de Vitalie Cuif à Roche.
Ru à la lisière d’un bois près de Roche.
Une marche de cinq jours, depuis Saint-Quentin près d’Aiglement jusqu’au Roc La Tour près de Monthermé. En montant et en descendant le long des crêtes de Meuse, en passant les rivières et les gués, en fuyant l’orage dans les forêts des hauts plateaux. Mai 1992
Une marche de cinq jours, depuis Saint-Quentin près d’Aiglement jusqu’au Roc La Tour près de Monthermé. En montant et en descendant le long des crêtes de Meuse, en passant les rivières et les gués, en fuyant l’orage dans les forêts des hauts plateaux. Mai 1992.
Une marche de trois jours autour de la Semoy, depuis le Roc la Tour jusqu’au gué de l’Époine avant Bouillon et retour vers Pussemange. Ciel immobile, forêt opaque et silencieuse. Octobre 1992.
Invité, il y a tout juste trente ans en 1991, à travailler sur le territoire de Rimbaud, j’ai réalisé quatre séries photographiques qui architecturent ce projet, Mémoire blanche. Je me suis défendu d’être dans un esprit d’illustration ou de citation (un poème ou quelques vers contre une image), et j’ai plutôt recherché un modus operandi qui m’amène à recouper mon propre territoire avec celui du poète. Faire du territoire una cosa mentale e poetica, la mienne et celle d’Arthur.
À vrai dire, on ne peut pas créer, inventer, si le corps et l’esprit sont trop chargés des auteurs qui nous importent. L’écrivain devant sa page blanche doit se débarrasser des maitres encombrants. Il faut savoir en être imprégné tout en ayant en quelque sorte la mémoire oublieuse. Alors seulement, on peut vivre, ressentir presque naturellement Arthur ; errer avec lui dans Charleville, autour de Roche, le long de la Meuse ou de la Semoy ; et ce qui advient, l’étrangeté de ce qui s’offre au regard, remplit le blanc de la mémoire de perceptions, d’épiphanies, de coïncidences, d’extravagances qui sont autant de petits signes envoyés par le frère Voyant.
Tous les articles du hors-série n° 5 d’En attendant Nadeau