Sortir de nos écrans en restant connectés
Le « Décamérez ! » de Nathalie Koble a enchanté notre premier confinement. Elle propose aujourd’hui une autre formule, le « Devizoomons ! », une traduction créative de poèmes-minutes de la fin du Moyen Âge (des rondeaux, et surtout des devises méditatives illustrées). Les vers remplacent la prose, et la méditation (souvent très politique) le récit.
Le « Devizoomons ! » nous invite à lâcher nos écrans tout en restant connectés grâce à des « devises », poèmes-minutes et méditations illustrées qui nous font deviser. Deviser, c’est-à-dire converser, partager, échanger, penser à plusieurs — par et malgré nos écrans, ces salles plates (de cours, de sport, de bibliothèque, de concerts, de musées).
La poésie nous entretient : des autres, du monde, de soi-même ; elle prend soin de nous déplacer. En traduction, elle creuse un entre-deux qui nous redonne un peu d’espace, du temps. À distance, « Devizoomons » propose donc des microdéplacements, en empruntant la main des autres et des mots d’ailleurs. Les devises du poète Henri Baude, exact contemporain de François Villon, suscitent un premier décalage, entre texte et image, français ancien et traduction. Extraits d’un album destiné à la tapisserie ou la peinture sur verre, lequel est transmis par un manuscrit du XVIe siècle inédit (Paris, BnF, fr. 24461), ces courts poèmes magnifiquement illustrés font faire des rapprochements et reviennent, de loin, éclairer notre contemporain déphasé.
Nathalie Koble