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Journal de la littérature, des idées et des arts 09/08 – 15/08
En attendant Nadeau
Grésillements
Le mois d’août grésille, il fait chaud, on voudrait paresser en s’instruisant. On pourra alors s’aventurer aux pays de Tintin, guidé par Michel Porret ; au Mexique, guidé par Gilles Tiberghien ; dans l’œuvre de Matisse évoquée par une vraie guide, Amélie Sabatier. Vous aimez la brièveté ? Vous aurez quelques haïkus neufs. Vous profitez de la Méditerranée ? Elle est présente dans la nouvelle d’Aziz Chouaki. Mais plus lointaine dans La porte du soleil, le roman d’Elias Khoury célébré par Sonia Dayan-Herzbrun.
Éditorial
Sous le soleil exactement
Sommaire
Le Phénix
par Ulysse Baratin
Principes et pratiques d’action sociale. Sens et non-sens de l’intervention sociale.
par Aissa Kadri
Le soleil comme la mort
Philosophe, historien de l’art, marcheur, Gilles Tiberghien traverse les zones brûlantes du continent américain depuis de nombreuses années. Il note, compare, songe, se souvient de lectures. Le soleil, souvent cruel, lui a inspiré la méditation qui suit.
L’exil palestinien comme épopée solaire
Il est des romans dits solaires. À cause de l’émotion qu’ils procurent, de la richesse de leur structure, de leur portée historique et politique. Et pour certains, parce qu’ils parlent d’une terre aride et déchirée par un trop long conflit. On entre dans celui d’Elias Khoury par la porte du soleil et de la tragédie mêlés.
« D’amour », une nouvelle d’Aziz Chouaki
D’amour est une des premières nouvelles écrites par Aziz Chouaki, né en 1951 à Tizi Rached, en Kabylie. Nous sommes en 1988, à Alger, les émeutes font espérer une percée démocratique, mais elles donnent lieu à l’émergence du Front islamique du salut. Chaque semaine, Le Nouvel Hebdo publie une nouvelle d’Aziz Chouaki en précisant « Ceci est une fiction ». Peu après, le nom de l’écrivain apparaît sur les murs des mosquées d’Alger parmi la liste des personnes à abattre. Menacé de mort, il fuit en France en janvier 1991. À la fin de l’année, le FIS remporte les élections municipales.
Haïkus
Le haïku est pour beaucoup la forme brève par excellence. Il est né dans le Japon du XVIIe siècle, avant de conquérir la poésie occidentale au XXe siècle. Comme par jeu, EaN a proposé à des poètes contemporains – d’André Velter à Aurélie Foglia – de se saisir de cette forme contrainte et d’écrire des poèmes autour du soleil.
À la Une du n° 178
Edward Thomas, poète-combattant
La parution d’une jolie plaquette bilingue donne aujourd’hui au lecteur français le plaisir de découvrir Edward Thomas, l’un des poètes-combattants qui ont construit la vision littéraire de la Grande Guerre au Royaume-Uni.
Action poème
Le dernier livre de Dominique Fourcade, flirt avec elle, comporte quinze séquences, quinze flirts numérotés. Le pronom du titre, qui désignait d’abord une lectrice inconnue, s’est mis à renvoyer à l’Ukraine dès le déclenchement de la guerre. Le féminin, la guerre et la mort sont les thèmes principaux de l’ouvrage.
Sur le terrain de la couleur
Deux livres récents se sont engagés, chacun à sa manière, sur le terrain de la couleur. L’essai de Peter Sloterdijk se présente comme un ouvrage destiné à un grand public cultivé et déclare avoir trouvé la clé de tout : le gris. Plus sérieux, l’ouvrage d’Hervé Fischer s’apparente à une somme et insiste sur le rôle du mythe pour comprendre les couleurs.
La littérature face à la débâcle de 1940
La France en éclats, d’Aurélien d’Avout, est issu d’une thèse de littérature qui a méthodiquement rassemblé et analysé les œuvres qui, sous divers genres, témoignent aujourd’hui des six semaines de débâcle qui, au printemps 1940, ont disloqué la société française et démembré le territoire national.
Une odyssée au féminin
Le livre de Violette d’Urso, Même le bruit de la nuit a changé, nous conduit de surprise en surprise. Intitulé roman, il colle à la biographie de son autrice ; émaillé de chansons, il est lourd de souffrance contenue ; éloge de la sororité, de l’amour parental, il malmène, ô combien, les secrets de famille ; allègre, primesautier, il révèle un savoir littéraire et humain auquel les écrivains en herbe ont rarement accès.
« Comme la vie, la mort est un rêve »
Le petit livre que nous donne aujourd’hui Muriel Pic, Dialogues des morts sur l’amour et la jouissance, est intrigant : le nœud de l’intrigue en reste secret et ne se révèle que dans deux phrases que séparent plusieurs dizaines de pages.
Lire, relire Saïda Menebhi
La réédition des textes de la poétesse et militante marocaine Saïda Menebhi (1952-1977) redonne à entendre une voix pleine d’une colère juste et généreuse, une voix qui, depuis sa prison, crie son refus de l’injustice, de la torture, de tout ce qui bafoue l’humain.
Marc Augé, irremplaçable !
Marc Augé, né en 1935 et décédé le 24 juillet dernier, laisse derrière lui l’une des œuvres importantes de l’anthropologie française contemporaine. Jean-Paul Colleyn, qui lui rend hommage pour En attendant Nadeau, voit en lui un chercheur « transculturel », capable de relier des mondes et des objets différents avec la même curiosité pour le social et la même compréhension fine du politique.
Histoire de la BO du monde
Isabelle Kalinowski propose avec La mélodie du monde une exploration de textes inédits en français mais dont l’impact sur la pensée musicale reste immense. Au début du siècle dernier, des penseurs allemands ou états-uniens inventaient en effet une compréhension neuve de la musique, dans laquelle se sont forgées des théories et des pratiques radicales et influentes. Pierre Tenne s’est entretenu avec l’autrice.
Vues de dos
L’actualité parisienne de Degas est très riche, à raison même de l’immense variété de ses talents. La BnF nous propose en ce moment une exposition où l’on peut admirer dessins, estampes et photographies. C’est l’occasion de réfléchir à l’originalité profonde de cette œuvre, en particulier dans l’art de peindre le dos, face aveugle du corps.
Une écriture enchantée du monde paysan
Bonne nuit mes doudous a pour cadre un village d’une âpreté magique, étranger à la modernité, à l’atmosphère proche de Giono. Le romancier grec Nikitas M. Papakostas a écrit là un troublant petit chef-d’œuvre.
Voix contemporaines
Notre chronique de la poésie contemporaine s’arrête aujourd’hui sur des recueils de Béatrice Bonhomme, Jean-Pierre Verheggen, Jean-Claude Caër, Charlotte Mont-Reynaud (le premier de son autrice), Ouled Ahmed et Carles Duarte.
